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  • Photo du rédacteurJulien Gaüzère Auteur

Il neigera bientôt sur Pine Ridge : Chapitre 5

Dernière mise à jour : 28 mai 2020

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Lorsque je revins dans la grange avec la bassine d’eau chaude que ma mère m’avait demandé, Chankoowashtay reprenait lentement connaissance. Il continuait cependant à perdre beaucoup de sang. La paille qui jonchait le sol s’en était imbibée.


Ma mère se saisit d'un linge qu'elle trempa dans la bassine. Elle prit soin de nettoyer la plaie ouverte du guerrier Sioux. De la paille et du sable s’étaient logés autour de sa blessure. Elle me demanda ensuite de lui ramener son matériel médical qu’elle avait conservé dans l’armoire de sa chambre. Je m’exécutais sans poser de question, de peur de voir Chankoowashtay mourrir dans nos bras.

Ma mère était stressée à l’idée d'exécuter cette opération. En réalité, elle n’avait pas apporté de soins à un homme depuis la fin de la guerre de Sécession. Ses mains tremblaient en agrippant les différents ustensiles. Chankoowashtay fixait le plafond de l’étable, il serrait les dents. Sa douleur le faisait souffrir. Le guerrier Sioux commença à grelotter. Ses yeux se révulsaient de temps à autre. Ma mère savait que ce n’était pas bon signe. Elle tenta de lui parler pour occuper son esprit.


« Beaucoup d’Indiens présents à la bataille de Little Bighorn se sont enfuis après la victoire… Pourquoi êtes-vous revenus dans les Black Hills ? »


Avec difficulté, Chankoowashtay tenta de répondre à ma mère. Il s’interrompait de temps à autre pour hurler de douleur. Il continuait à fixer le plafond de la grange. Il ne prêtait pas attention au gesticulation de ma mère qui tentait d'extirper la balle logée dans son abdomen.


« J’ai quitté mon village avec neuf guerriers et deux braves de ma tribu. J’ai laissé derrière moi ma femme et mon fils. Je leur ai promis que je reviendrai… Que nous remporterions la victoire… Mais lorsque je suis revenu chez moi, le village n’était plus là...»


Ma mère qui était concentré sur la blessure de Chankoowashtay, s’interrompit. Je me souviendrai toujours du regard qu’elle lui lança à ce moment précis. Elle commençait à le regarder, non plus comme un guerrier rebelle, mais comme un homme remplit de désespoir.


« J’ignore ce qui est arrivé à mon village… Il n’y avait aucune trace d’affrontements, aucune marque de violences… L’herbe dessinait encore les contours de nos tipis. J’ignore où sont partis les miens… J’ignore si notre campement s’est déplacé ailleurs dans les Black Hills ou si l’armée a conduit mon peuple vers grande réserve Sioux du côté de Pine Ridge… J’espère qu’ils ne sont pas là bas… » poursuivit Chankoowashtay.


Nous avions beau vivre au plus près des tribus Lakotas de la région, nous ignorions beaucoup de choses sur le mode de vie de nos voisins autochtones. La vision que nous avions de ces nouvelles réserves était abstraite... Et surtout erronée.


« Pourquoi ne souhaitez vous pas les savoir en sécurité dans la réserve ? » interrogea ma mère pendant qu’elle reprenait avec minutie son intervention.


Chankoowashtay semblait s’être accommodé à la douleur. Sa voix était posée et sûre, il ne s’interrompait plus pour hurler ou reprendre son souffle. Il expliqua longuement à ma mère le fonctionnement des réserves du pays. Beaucoup de tribus avaient déjà gouté à l’amertume de ces endroits.


L’armée gardait certaines d’entres elles, comme des prisons à ciel ouvert. Dans ces réserves, les peuples autochtones étaient mélangés, sans tenir compte des rivalités entre tribus, ce qui donnait lieu à des bagarres qui amusaient les soldats.


On ordonnait aux différentes Nations de laisser tomber leurs coutumes et leurs modes de vies. Les tipis devaient être remplacés par des cabanes en bois, les cheveux des hommes coupés court comme les blancs et les tenues vestimentaires ancestrales abandonnées. Parfois, ils devaient aussi se convertir et apprendre la religion des « blancs ».


Les tribus étaient souvent regroupées sur des parcelles de terres pauvres et peu fertiles. L’agriculture y était difficile et la chasse interdite. Il fallait donc compter sur les rations en nourriture du gouvernement qui étaient peu généreuse. Les femmes, les enfants et les hommes étaient en proie à la maladie et à la faim... Lorsque d'autres glissaient lentement dans l’alcoolisme.


« Je ne veux pas voir ma famille mourrir à petit feu dans un endroit comme celui là… » conclut Chankoowashtay.

Il resta silencieux un long moment. Ses yeux commençaient à s’embuer de larmes . Il tentait de les contenir et de les cacher. Le guerrier Sioux semblait dépassé par les événements qu’il vivait. Il réalisait peu à peu que son monde s’effondrait.


« J’ignore si nous pourrons un jour revivre dans les plaines… Mais je veux y croire »


Ma mère regardait de temps à autre Chankoowashtay avec compassion. Elle n’avait pas de mots assez justes pour soulager cette douleur. Elle savait soigner les blessures mais les maux du coeur restaient, pour elle, une énigme.


Je venais d'assister à toute l’opération, sans même tourner mon regard face au sang. Je me souviens du sourire de ma mère lorsqu’elle réussit à déloger la balle dans l’abdomen de Chankoowashtay. Elle referma sa plaie et lui appliqua un bandage qui s’enroulait à sa taille.


« Merci infiniment pour ce que vous avez fait… » ajouta Chankoowashtay en attrapant avec bienveillance les mains de ma mère. « Vous m’avez soigné et je ne connais même pas votre nom… »

« Je m’appelle Margaret O’Sullivan et voici mon fils Dany, mais je crois que vous l’avez déjà vu » répondit ma mère tout en m’invitant à m’approcher un peu plus du guerrier Sioux.


Chankoowashtay esquissa un timide sourire et se saisit de mon loup en bois que j’avais gardé dans mes mains durant tout ce temps : « Je t’avais dis que ce loup est un guide… Et bien vois-tu petit, il m’a conduit jusqu’à toi… Il montre toujours la bonne voie ». Après avoir porté le loup à son coeur, il le reposa dans mes mains.


Ma mère suggéra que nous laissions Chankoowashtay se reposer et reprendre des forces. Elle lui déplia une large couverture et un oreiller rembourré de plumes d’oies pour maintenir sa tête. Exténué par les mésaventures qu’il venait de vivre, le guerrier sioux s’endormit. Nous quittâmes la grange le plus discrètement possible.


La nuit se passa sans encombres. L’orage quitta les plaines, la pluie cessa peu à peu et au petit matin, un grand ciel bleu s'empara des alentours de la ferme Flanagan.

Après avoir pris notre petit déjeuner dans la maison, ma mère et moi, retournâmes au chevet de Chankoowashtay. Elle voulait s’assurer que sa blessure reste propre pour que la cicatrisation se passe au mieux. Lorsque nous entrâmes dans l’étable, le guerrier sioux était déjà réveillé. Il s’était saisi d’un morceau de bois qui se trouvait au milieu de notre réserve pour les hivers difficiles. Il le sculptait à l’aide de son tomahawk. Il était concentré et calme. J’avais hâte de découvrir quelle création il préparait.


Ma mère retira soigneusement les bandages de Chankoowashtay. Elle fut rassurée par la couleur et l’aspect de sa cicatrice. Elle commença à nettoyer les contours de sa blessure et à préparer de nouveau pansements. Le Lakota la regardait avec attention et admiration. Il trouvait ma mère précise dans ses actions et délicate dans ses gestes.


« Dites-moi Margaret, où avez vous appris l’art de la médecine ? » demanda Chankoowashtay tant il était impressionné.


Ma mère ne pu s’empêcher de sourire à cet instant. Elle paraissait flatter que l'on s’intéresse à son histoire et ses qualités. Tout en continuant à préparer les bandages, elle commença à se confier…

En 1857, alors qu'elle se nommait encore Margaret Elisabeth Anne Brennan, ma mère vivait dans les vallées mystérieuses de l’Irlande. Rien ne la prédestinée à voyager par delà l'océan. Elle grandissait avec insouciance dans un petit village appelait Castlemaine.


Elle avait 10 ans lorsque son destin pris un tournant assez inattendue. La vie en Irlande était devenue difficile… Très difficile. La famine qui frappa le pays entre 1845 et 1852, laissa les habitants de Castlemaine dans la misère et la maladie. Les terres peinaient à redevenir généreuse. Ma mère et sa soeur, tante Kathleen, qui avait 13 ans, connaissaient très bien les plaines irlandaises, les bois légendaires et les ruisseaux qui traversaient les vallées.


Elles partaient souvent toutes les deux en expédition, dans la nature, pour ramener à leur mère différente herbes médicinales. Celle ci s’appelait Deirdre mais au village, elle était surnommé Baintreach Cailleach : la veuve sorcière.


Les gens la soupçonnaient, sans trop en avoir la preuve, de posséder des pouvoirs magiques et de connaître le monde des fées. Deirdre ne faisait en réalité que perpétuer des connaissances très anciennes sur la médecine des plantes. Elle venait souvent en aide à ceux qui lui demandaient conseil. Deirdre élevait ses deux filles seule. Elle avait à coeur de leur transmettre son savoir. Ma mère appris donc très jeune les bienfait de la médecine par les plantes.


Malheureusement, la situation étant si rude à cette époque, Deirdre décida qu’il valait mieux quitter l’Irlande, pour le bien de ses filles. C’est donc par une journée pluvieuse et brumeuse qu’elles quittèrent toutes trois cette terre qu’elles chérissaient tant. Elles embarquèrent à bord d’un navire en partance pour l’Amérique. Ma mère ne vit même pas une dernière fois les vallées, les falaises abruptes et les ruisseaux généreux. Le brouillard cachait les dernières beautés de son pays… Comme si la magie de l’Irlande était partie avant elle.


Les conditions à bord de ce navire furent difficiles. Les Irlandais y étaient entassés dans des conditions insalubres... Comme Derdre, ils fuyaient en rêvant d'une vie meilleure aux Etats-Unis. Mais avant de pouvoir gouter à cet Eden, il fallait d'abord survivre sur ce vaisseau chancelant.


Les maladies se propageaient bord. Deidre, avec l'aide de ma mère, tentait de soigner les gens souffrant. Malheureusement, à la maladie s'ajoutait aussi la faim... Le bateau était partie avec très peu de denrées en raison de la famine Irlandaises. Les cales du bateau étaient vides et le peu de nourriture, souillées par les rats.

Par chance, un docteur était à bord : Le docteur John Crowley. Un homme d’une quarantaine d’année qui appartenait au haute sphère de la société Irlandaise… Seulement sur le bateau, la misère ne faisait pas de distinction de classes. Elle frappait tout le monde.


Le docteur Crowley proposa très vite à Deirdre de l’assister. Ensemble ils sauvèrent de nombreuses vies malgré des pertes innombrables. Pour assurer l’hygiène à bord, les corps des défunts étaient jetés à la mer. Une courte cérémonie sur le pont du navire était organisée.


Les passagers les plus robustes ramenés les corps sur le pont. Quelques chants irlandais était entonnés avant de lâcher les dépouilles dans les eaux déchaînées. S'en suivait une prière pour accompagner les âmes et leur permettre de trouver la paix. Il n'y avait pas un jour sans un adieu, pas un jour sans les cris d'une femme, d'un époux, d'un enfant ou d'une mère, pas un jour sans des larmes... Pas un jour sans prières.


Malgré son âge, ma mère gagna la confiance du Docteur Crowley. Il était impressionné par sa capacité à apprendre et à exécuter ses ordres. Elle ne quittait plus Deirdre et Crowley. Il lui appris à faire des sutures, la toilette des malades ou apaiser leurs fièvres. Elle découvrit, grâce à lui, une forme inconnue de médecine. Une médecine qui la fascinait. Elle admirait cet homme toujours calme et prévenant avec ses malades.


Il savait être agressif face aux virus qu’il défiait et doux avec les âmes qui glissaient vers la mort. Tout cela fit oublier à ma mère la dureté des jours et la longueur de ce voyage. Par un matin ensoleillé, elle vit pour la première fois New-York. La ville de New-York qu’elle découvrit depuis le bateau, ne possédait que peu de ressemblances avec celle que je vis bien des années plus tard : Pas de statue de la liberté, pas de port délimité, pas de grand immeuble non plus. Pourtant elle resta subjugué par son immensité et sa grandeur car cela n’avait rien de comparable avec les vallées et les villages de l’Irlande.


En descendant du navire, chaque Irlandais devaient passer un examen médical, s’enregistrer et bien sûr payer le droit d’entrer sur le sol américain. Certain avait la chance de retrouver de la famille déjà sur place… Mais pour les autres, c’était le début d’une vie précaire et incertaine.


Deirdre tomba malade à son tour, peu de temps avant d’arriver à New-York. Elle fut donc placée en quarantaine avec ma mère et tante Kathleen. Les deux petites filles étaient perdues et inquiètes. Les infirmières et les médecins ne leur adressaient pas la parole et les laissaient dans le doute concernant l’état de santé de leur mère.


Le Docteur Crowley aurait très bien pu démarrer sa nouvelle vie à New-York dans la minute. Mais après tant d'épreuves traversées côte à côte, il ne pu se résoudre à abandonner Deirdre et ses filles. Il s'était beaucoup attaché à elles durant ces longues semaines.


John Crowley tenta tout ce qui était en son pourvoir pour sauver Deirdre. Mais la jeune sorcière irlandaise avait développé un scorbut, possédait plusieurs morsures sérieuses de rats et ses carences l’avaient fortement amaigrie.


Crowley ne voulait pas que les filles voient leur mère partir si tristement. Il les préserva donc de cette image et laissa Deirdre mourir avec apaisement dans ses bras, comme il savait si bien le faire.


Après son décès, Il fut décidé que ma mère et tante Kathleen resteraient avec le Docteur Crowley. Les deux soeurs se retrouvaient dans une ville nouvelle, loin de leurs racines et aux côtés d’un homme dont elles ignoraient encore tant de choses.


Lorsque ma mère acheva son histoire, elle était au bord des larmes. Les blessures du passé semblaient encore vives et douloureuses. Chankoowashtay ne trouvait pas les mots pour la réconforter… moi non plus d’ailleurs. Il se contentait de la regarder avec compassion pendant qu’elle achevait de lui poser son bandage.


« Ma soeur et moi avons reçu beaucoup d’amour de la part du Docteur Crowley. Il nous a élevé comme si nous étions ses propres filles. Puis assez vite, lorsqu’il ouvrit son cabinet médical, j’ai commencé à travailler à ses côtés et à l’assister comme à l’époque où nous étions sur ce navire » Acheva ma mère toujours sur le fil de l’émotion.


« Qu’est devenu le Docteur Crowley ? » demanda Chankoowashtay, se rendant bien compte que l’issue de cette histoire laissait encore une lourde cicatrice dans le coeur de ma mère.


Elle commença à raconter brièvement ses années d’infirmière durant la guerre de Sécession. Elle y découvrit des blessures qu’elle n’avait jamais imaginé. Elle soignait en priorité les soldats des troupes du Nord mais il lui arrivait aussi de devoir prendre soin de certains confédérés.


Ma mère, malgré ses convictions forte et sa tolérance, se rendait bien compte que tous les hommes se paraient de la même faiblesse sur les lits des camps de fortunes dont elle s’occupait. Ils appelaient leurs femmes, leurs enfants, leurs mères… Ils devenaient spirituel ou expiaient leurs dernières fautes. Ma mère les écoutaient sans jugement. L’horreur de cette guerre surpassait les querelles et les rivalités.


Elle nous confia son pire souvenir de cette guerre… Ce fut après la bataille de Gettysburg, le 3 juillet 1863. Pour beaucoup, elle marqua un tournant dans l’issue de la guerre de Sécession. Les sudistes durent faire face à une défaite écrasante. Mais malgré cette victoire, les pertes humaines des deux camps étaient trop atroces pour célébrer quoi que ce soit.


Ma mère, avec les autres infirmières et médecins, était sur le qui-vive pour soigner au plus vite un maximum de soldats. Elle passait de blessures par balle en amputations, de hurlements en gémissements, de larmes en apaisements, de victoire en défaite… Il n’y avait pas une minute de répit ce jour là… Pourtant elle se souvint de l’heure exacte, où George Armstrong Custer, jeune général de la brigade des engagés volontaires à cette époque, arriva sous la tente avec à son bras, le Docteur Crowley grièvement blessé.


Crowley avait reçu des tirs de grenaille de plomb dans le cou. Son sang jaillissaient de toute part, depuis sa carotide jusqu’à son torse. Custer tentait tant ben que mal de retenir les écoulements avec ses bras et quelques foulards militaires déjà bien trop souillés.


Il appelait à l’aide au milieu du brouhaha et des va et viens des soignants débordés. Ma mère allongea John Crowley mais ne put intervenir sur ses blessures. Elle s’occupait déjà de soigner plusieurs hommes dont la vie n’était pas menacée. Elle savait que malheureusement, Crowley n’avait aucune chance de survivre à ses blessures. Ma mère hurlait à travers la tente pour demander de l’aide…


« Quelqu’un pourrait s’occuper de mon père ???!!! »


Mais personne ne semblait disposée à pouvoir l’opérer. Il y avait trop de soldats et pas assez d’infirmiers. Crowley regardait ma mère se démener et s’appliquer sur chaque patient. Il esquissa un sourire apaisé et fier.

Ma mère sentant qu’il commençait à trépasser, tenta de lui parler pour le garder éveillé et pour le rassurer.


« Tenez bon Père, je vais bientôt m’occuper de vous d’accord ! »


Avant de se laisser partir, il chuchota à celle qu’il avait toujours considérait comme sa fille :


« C’est la première fois que tu m’appelles Père… Je suis si fière de toi Margaret »


Ma mère nous décrivit les larmes de Custer. Des larmes qu'elle attribua à l'épuisement, à la colère et à l'impuissance. Elle fut envahie par un sentiment d’abandon lorsqu'elle posa le drap blanc sur le visage endormi de Crowley. Elle revivait à nouveau la perte de l’Irlande, de sa mère Deirdre et se retrouvait pour la première fois réellement orpheline.


Custer resta longtemps sous la tente après cette bataille. Il observait, fatigué, les hommes qu'il venait de perdre dans la bataille. Ma mère n’avait pas de mots assez fort pour lui ce soir là. Elle se souvient juste qu’ils transportèrent tous les deux les corps à l’extérieur. Même s’il restèrent silencieux une bonne partie de la nuit, leur simple présence apaisait leurs douleurs mutuelles.


Chankoowashtay découvrait avec ce récit, l’horreur de la guerre à travers le regard des ‘’blancs’’. Il voyait aussi le général Custer sous un autre jour.


« Nous n’avons visiblement pas connu le même homme. Vous avez eu le privilège de connaitre George Armstrong Custer et j’ai eu la malchance de croiser la route du général Long Cheveux » ajouta Chankoowashtay, déconcerté par cette facette du général qui lui était étrangère.


Je me demanderai toujours ce qui traversa l’esprit du guerrier Sioux après ce récit de ma mère. Lui qui avait tué Custer de sang froid et qui n’avait connu de lui que l’assassin des tribus autochtones et le chercheur d’or des Black Hills.


Chankoowashtay semblait anxieux... Des images de la bataille qu'il venait de vivre revenait sans doute le hanter. Il avait hâte de pouvoir quitter Flanagan et de repartir à la recherche de sa famille. Brusquement il se leva et commença à rassembler ses affaires.


« Je pense que je vous ai causé assez d’ennuies, il vaudrait mieux que je parte… »


Ma mère, toujours prévenante avec ses malades, retint le Lakota qui était encore faible.

« Vous ne pouvez pas reprendre la route dans cet état. Votre blessure doit cicatriser. J’aimerai vraiment que vous restiez ici encore quelques jours. Le temps de reprendre des forces. N’oubliez pas que les soldats et le Sergent Thomas vous cherchent. S’ils vous trouvent dans cet état ils vous tuerons ! »


Ma mère savait que Chankoowashtay s'inquiétait pour les siens. Au fond d’elle, je sais qu’elle imaginait le pire concernant le devenir de sa famille et de son village. Mais à présent, elle commençait à ne plus croire au bienfait de la grande réserve et de la fin du mode de vie des Lakotas. Elle resta silencieuse un moment puis eu une idée assez éclairée. Elle proposa à Chankoowashtay de rester à la ferme Flanagan jusqu’au retour d’Elliott.


« Une fois que mon époux sera revenu des Black Hills, il pourra peut être vous ramener auprès des vôtres ? Peut-être les aura t-il vu ou sera t-il où ils se trouvent ! Mon époux connait très bien les Lakotas et je suis sur qu’il vous aidera avec plaisir. Acceptez notre aide… S’il vous plait »


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