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  • Photo du rédacteurJulien Gaüzère Auteur

La nuit Latuquoise (Chronique #133)


6 Mai 2018,

J’écris bien plus que du temps où je vivais à Paris. Je me suis éloigné des boulevards et je me suis rapproché des rêves que l’on me disait inaccessibles… Aujourd’hui, à La Tuque, loin de tout, je les embrasse pleinement… Je n’ai jamais été autant écrivain ! Je n’arrive pas à dormir… Je m’interroge en regardant par la fenêtre. J’entame le dernier mois à l’école forestière… Mes dernières nuits dans cet appartement. Je commence à rassembler mes affaires… J’ai ressorti ma valise. Je dois tellement à La Tuque ! Je suis revenu à la vie dans ces murs, j’ai crée de nouveaux personnages, de nouvelles histoires. J’ai retrouvé l’apaisement dans les forêts d’épinettes, j’ai rencontré de nouveaux amis… J’ai peur de partir… Peur de laisser la meilleure part de moi ici…

Je n’arrive pas à trouver le sommeil ce soir. Trop de doutes, trop de questions traversent mon esprit. Pour apaiser mes sombres pensées, je préfère regarder la nuit Latuquoise par ma fenêtre. La longue route du Boulevard Ducharme a bien changé… J’avais presque oublié à quoi elle ressemblait sans son manteau d’hiver.


Je n’arrive pas à trouver le sommeil ce soir. Les lumières monotones des lampadaires de mon quartier bercent mes idées noires. Mon regard se perd dans leurs halos orangés. Certaines vacillent, clignotent comme pour m’annoncer que bientôt il sera temps d’éteindre cette lueur… Où vont-elles me conduire ?… Etrangement je n’ai pas envie de le savoir.


Je n’arrive pas à trouver le sommeil ce soir. Je regarde les corbeaux et les corneilles qui se sont endormis sur les fils électriques du Boulevard Ducharme. Ils semblent bien plus serein que moi… Peut être parce qu’ils sont habitués à partir, à ne jamais regarder derrière eux. J’aimerais avoir leur faculté et m’envoler sans regrets.


Je n’arrive pas à trouver le sommeil ce soir. Je guette le passage de quelques pick-up et camions qui fuient La Tuque dans la nuit. Ils tracent leur route incertaine vers Shawinigan ou Trois-rivières.

Ils empruntent un chemin qui m’effraie autant qu’il m’appelle. Partent-ils vers une vie meilleure ?… Etrangement je n’ai pas envie d’y croire.


Je n’arrive pas à trouver le sommeil ce soir. J’entends le train de marchandises qui quitte La Tuque dans la nuit. Il est bruyant et vient quelque peu perturber mes instants de réflexion. Il suit les rails, ces mêmes rails qui m’ont déposé ici il y a neuf mois. Comme le temps a filé. Il m’échappe et de s’amoindrir.


Je n’arrive pas à trouver le sommeil ce soir. J’observe cette pluie fine qui dégringole sur les toitures. Elle semble plus intense sous les lampadaires du Boulevard Ducharme. Sous leur lumière, elle arbore des couleurs tristes et mélancoliques. Annoncent t-elles les larmes à venir ?… Etrangement je pense qu’elles seront inévitables.


Je n’arrive pas à croire que tout s’achève… Qu’il est déjà temps de rassembler les affaires. D’oublier la neige, les lampadaires du Boulevard Ducharme, les corbeaux et les corneilles, le train de nuit et qu’il me faut désormais regarder cette route qui abandonne La Tuque derrière elle. Il ne nous reste que peu de temps… Etrangement je suis obligé de m’y préparer.

Je n’arrive pas à trouver le sommeil ce soir. Trop de doutes, trop de questions traversent mon esprit. Pour apaiser mes sombres pensées, je préfère regarder la nuit Latuquoise par ma fenêtre. Nous avons tous tellement changés… Jamais je n’aurai cru m’attacher autant à La Tuque… Je commençais tout juste à me sentir chez moi…

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